Je viens de relire "Entre courir et voler il n'y a qu'un pas papa" de Jacques Gamblin aux éditions le Dilettante, et je ne peux m'empêcher de vous livrer (ou relivrer pour certains) mon passage favori...
« Tu fais une inspiration calme. Ton corps il est bien dans l’axe. Rien ne bouge. Ton nombril c’est ton radar. L’air inspiré par ta bouche ressort par le trou de ton cul. Rien qui l’arrête. Pas de prise au vent. Ton cul c’est ta force. N’oublie jamais ça. C’est lui qui te transmet la puissance. Dans un contre-ta-montre, tu ne penses pas tu avances. Tu penses pas au lendemain, ni au surlendemain ni au sur-surlendemain. Tu penses à la journée même. Même pas à la journée. Tu penses à tout de suite. Au pas que tu fais. Sans rien voir que l’avenir proche. Douze mètres cinquante, pas plus. Plus loin c’est trop loin et c’est casse-gueule. Plus loin que le bout de ton nez, tu perds ton équilibre. Tu la connais la route. Tu la prends, tu la respires, tu la grignotes. Ce n’est pas toi qui progresses dessus, c’est la terre qui régresse en dessous. Et si ton cul te double, c’est que tu vas trop vite. Et tu vas le payer plus tard. Ne laisse jamais ton cul partir devant. Il te parle. Ecoute-le, c’est le centre de ton monde, le centre de ta gravité. Alors serre pas les fesses et rigole, ça détend le trou de balle ! Et si jamais tu pètes, c’est que tout est ouvert et que ça circule. Personne t’entend, personne te voit. T’es plus un homme, nom d’un pétard ! Tu n’es plus rien ! Ta bite, y en a plus, disparue sous le cuissard en Lycra. Ta gueule, on s’en fout, elle est rouge et elle transpire. Alors, surtout pas de grimaces hein ! C’est des muscles qui travaillent pour rien ! Ca t’aide pas à avancer les grimaces et c’est pas beau à voir. De la grâce, bon Dieu ! De la grâce ! Et si ton bronzage de Blanc s’arrête là où ton maillot de peau commence, qu’est ce que ça peut faire ? Tu ne poses pas à poil pour les magazines. C’est ton secret ça. Alors garde-le. C’est pas ta sculpture qu’on veut voir, c’est ton cœur. Donne-le ! Pose tes deux lèvres l’une sur l’autre parce que si tu les ouvres, il y aura toujours un moucheron qui te donnera des nouvelles du monde et que tu avaleras de travers. C’est plus le moment de tousser. Le temps qu’il fait tu t’en fous. Il y en a qui regardent la météo tous les soirs pour savoir de quelle humeur ils seront le lendemain matin. Toi tu ne prévois rien, tu prends ce qu’on te donne. Le soleil, ça réchauffe. La pluie, ça lave. Laisse la météo de vingt heures pour les frileux. Fais pas les comptes. Retiens rien. Y’a rien à perdre, tu es en survie. Alors donne-le ton cœur. Profite. Donne tout et fais profiter. Plus tu en donnes et plus il y en a. Quand il n’y en a plus, il y en a encore. Si tu donnes tout tu as rien à voler et si tu as rien à voler tu es un prince. Tu as choisi le tout-terrain, les creux et les bosses, les bleus et les crosses les pleins et les déliés. Tu es fait pour ça. C’est ta chance. Connais-la ta chance, putain ! C’est ta chance !... Et venez vous tous. Venez l’aider ce pauvre Blanc qui doute ! »
C'est pas magique les mots ?
kryzstof